Stéphane Travert a présenté le 31 janvier 2018 en Conseil des ministres le projet de loi censé mettre fin à la guerre des prix entre distributeurs, va-t-il redonner un peu d’air aux agriculteurs ?
Le projet de loi EGALIM, issu des états généraux de l’alimentation, à passer sa première série d’épreuves à l’Assemblée nationale, d’abord en commission du développement durables, qui s’est saisie de son titre et a d’ailleurs considérablement amendé le texte du gouvernement, puis en commission des affaires économiques.
Son contenu – axé pour sa première partie sur la rémunération des produits, se concentre ensuite sur la question de la restauration collective avant de s’appesantir sur les notions de qualité alimentaire et de méthodes de production. Les concertations très larges qui ont eu lieu pendant les six mois qu’ont duré les Etats Généraux de l’Alimentation donnent à ce texte tout à la fois une caution de la profession, des différents maillons de la chaîne qui relie le producteur au consommateur final, et aussi des experts qui y ont pris part. Cette consultation oblige aussi le gouvernement qui doit obtenir des résultats concrets et rapides pour que l’agriculture française retrouve espoir et aussi ses lettres de noblesse.
Ces constats confinent à une question simple : veut-on privilégier en France une vision post-moderne d’une agriculture ayant pour seules fonctions l’entretien de l’espace et le divertissement de citoyens épuisés par la vie moderne de cités énormes où alors croit-on encore en une agriculture vivrière, innovante, capable de succès économiques et garante d’une juste répartition de la population sur notre sol national ? La réponse pour nous est claire : c’est bien en rendant à nos paysans leur statut de chefs d’entreprises qu’on réussira le pari de l’avenir.
Alors pour en revenir au projet de loi du gouvernement, il est tout à la fois opportun dans son existence-même et ses axes, mais terriblement décevant par son manque d’envergure :
* Tout en abordant la question de la rémunération des produits, il ne va pas au bout d’une logique de recréation de richesse et ne donne pas aux filières l’entière capacité à contraindre les distributeurs à une juste valorisation. Avoir cette ambition, c’est oser aller au bout d’une démarche de déconcentration de la grande distribution française.
* Tout en prônant une meilleure place pour le bien manger dans le fonctionnement de notre société, à partir de ses prescripteurs publics, le projet de loi n’est pas assez ambitieux, notamment parce qu’il ne traite pas de l’allègement des normes, contraintes réglementaires de toutes sortes, et lourdeurs administratives qui lestent inutilement les coûts de production des agriculteurs français et les mettent en situation de compétitivité défavorable vis-à-vis de leurs concurrents,
* Tout en affichant plaçant au cœur de sa rédaction les notions indispensables de qualité environnementale et sanitaire des produits ‘à la française’, le texte n’aborde aucunement
* Enfin, notre pays est marqué par une réalité aussi évidente que terriblement fragile : la répartition de notre population est restée relativement homogène et la ruralité vit encore, avec de très forts dynamiques qui s’expriment dans nos villages et nos campagnes et ne demandent qu’à perdurer. Cependant, elles ne pourront le faire que s’il y a encore demain des agriculteurs, pivots de la vie rurale et qui conditionnent le maintien des aménités essentielles à la vie moderne. Ne pas traiter de la question centrale de la transmission des exploitations entre générations revient à ne pas regarder cet avenir-là en face.
Le texte est en discussion dans l’hémicycle depuis le 22 mai 2018 à l’Assemblée nationale, avant de passer aux mains des sénateurs ; il n’y aura qu’une seule lecture puisque le projet de loi fait l’objet d’une procédure accélérée et contient de nombreuses habilitations à légiférer par ordonnance.
Les débats en directs sont à visionner sur ses vidéos.
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